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Il ne fallut pas longtemps aux trois chroniqueurs pour comprendre quel était cet ouvrage supplémentaire. La reliure familière ne portait aucun titre et quand il l’ouvrit, Akdov ne feuilleta que des pages blanches. C’était un Libra, un troisième, encore un. Tout de suite cela leur sembla moins glorieux, ce livre tombé du ciel après une simple lecture d’ouvrage. Quirinal rajustant ses lunettes trouva le fait fâcheux, ce drogué de Vlad lui n’en pensait rien mais pour leur grand râleur d’ami, c’était mieux que rien.
« C’est à croire que ces ouvrages poussent sur des arbres. »
Le docteur fut très content de ce trait d’humour que personne d’autre ne comprit mais peu porté à s’intéresser de trop près à un énième ouvrage mystérieux, et la fatigue lui revenant, il proposa de sortir. C’est alors que le nouveau chroniqueur eut un cri d’horreur :
« Qu’est-ce que cette machine, ce machin fait là ?! »
Son doigt pointé accusait l’énorme monstre de machine à écrire qui avait, le temps de leur absence, comme écrasé le bois. Ce fut la panique. Qu’il fallait l’enlever maintenant, trop lourde, le bois craquait à l’oreille leur ami grognon répétait qu’il fallait sortir cette abomination de l’administration ou il faisait un malheur, le tout entrecoupé des remarques du drogué qui fouillait toujours sa bourse.
Ni une ni deux ils prirent à quatre bras puis à six la lourde machine qui alla s’écraser au plancher aux redoublements de cris et de soupirs affligés jusqu’à ce que Vlad fasse remarquer que la brouette était toujours dehors, ils tombèrent dessus à bras raccourcis et y chargèrent la chose. Quand ce fut fait le docteur suant s’épongeait le front d’un mouchoir l’air sévère.
« Et maintenant, je voudrais des explications. »¨
« Sur quoi ? »
Il apparut à au grand chroniqueur que ses deux compagnons n’avaient pas la moindre idée des événements qui secouaient les Chroniques, tandis qu’il apparaissait plus nettement à ces deux-la que lui en savait déjà plus long. Ils parlaient de ce faux nom de Naïa (pas très subtil) des portes fermées et de la dévastation dans les ouvrages. Les uns trouvant évident qu’ils avaient besoin d’explications, l’autre évident la situation actuelle, ils se regardèrent en silence un long moment, puis Quirinal entendit le mâchonnement de Vlad entre ses lèvres et soupira.
« Vous voulez dire », reprit Akdov presque railleur, « que vous ne savez rien ? »
« Mais c’est qu’tu s’rais génial, tu l’sais ça ? R’garde, j’t’applaudis ! »
« Excentrisme à part, nous ne savons en deux mots que ce que nous avons pu voir et nous n’avons jusqu’à présent pas vu grand-chose. »
C’était une situation suffisamment ennuyeuse pour que le chroniqueur se gratte la tête, à la recherche du début du commencement pour leur expliquer la situation. Il n’aimait pas les grands discours, pas plus que les choses compliquées et de devoir admettre une péripétie dans le sanctuaire inviolable des Chroniques était pour lui une sorte de gêne.
« Un personnage s’est échappé. »
« C’est tout ? »
« C’est tout ?! Tu te moques de moi, Quirinal ? Un personnage échappe au contrôle d’un chroniqueur – même pas d’un écrivant, note, mais d’un chroniqueur… »
« Nous n’allons pas débattre de l’élitisme… »
« Mais je ne te parle pas d’élitisme ! »
« Vous parlez d’élitisme ? »
« Non ! »
Et ce fut le fou rire pour tous, de se rendre compte que même avec le château saccagé ils ne pouvaient pas s’empêcher de prendre les choses à la légère et de se disputer pour des choses qui n’avaient plus le moindre sens.
Même s’ils ne le disaient pas, c’était pour tous un soulagement de se retrouver. Et même s’ils n’étaient pas tout à fait remis de leur lecture, au moins sentaient-ils que cette fois ils iraient quelque part, que l’errance avait peut-être bien cessé (on espère).

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