Tempête
- Demosthene
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- Vuld Edone
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Le premier paragraphe, pour une bonne part, n'est par contre pas convaincant, au sens où on se demande de quoi on parle et j'ai un peu eu l'impression de lire un texte de fantasy. C'est qu'à ce stade du récit il n'y a là tempête que pour la tempête, et même quand tu cites les goélettes, ça reste assez abstrait.
La première phrase du second paragraphe, par contre, nous plonge immédiatement dans l'histoire et c'est comme si le premier paragraphe n'avait jamais existé. On redécouvre la tempête cette fois de face, le navire de plein pied et on sent, avec les voilures, bien plus directement les effets.
Il faut quand même comparer avec : "En ce jour noir, le ciel se confondait avec la mer." Cette description-là est banale, et "jour noir" annonce généralement plus un malheur qu'une tempête.
Il arrive à peu près la même chose à la fin de l'histoire, quand on abandonne l'Anubis pour la discussion de sextant :
"Il vérifia que personne autour ne s'intéressait de trop près à leur conversation et déballa son trésor. Un objet de cuivre fait de leviers, de miroirs et de lentilles était posé là."
Déballer un trésor n'a pas la même tension que "arriver par le travers" ou "toucher au but". L'action est soudainement beaucoup plus commune, et décrite beaucoup plus informellement. Idem à la description du sextant, où on retrouve ce qu'Impe' appellerait le syndrome du pistolet, on nous donne l'objet décomposé avec au final des pièces familières, et on n'a pas vraiment envie de se demander ce que c'est. Surtout pour un simple sextant.
La différence de tension est alors flagrante. Durant l'essentiel du récit j'ai été tout à fait pris - encore une fois - et très vite par la lutte des deux bâtiments, face à la tempête ou à la canonnade, l'abordage et même le glissement. À côté de ça, la question du coffre, de la clé et de l'objet-mystère m'ont paru totalement accessoires, alors qu'on s'attendrait au contraire, dans un autre texte, à ce que ce soit le point de focalisation.
La grande force de tes descriptions repose vraiment sur le vocabulaire. J'ai tenté l'expérience avec :
"Les tirs manquaient déjà de précision par mer plate, alors avec le roulis, le tangage et la gîte, toucher au but relèverait du miracle."
J'ai opéré un remplacement du vocabulaire, en bref j'ai déplacé le contexte de maritime à terrestre :
"Les tirs manquaient déjà de précision par temps clair, alors avec la pénombre, la bruine et le vent, frapper juste relèverait du miracle."
Ma question était vraiment, si l'énoncé allait conserver la même force avec un vocabulaire qui, ne mentons pas, n'est plus technique (et encore, j'aurais pu mettre "beau temps", "nuit", "pluie" et "toucher quelque chose"). Et très franchement je pense que, dans un texte à peu près égal, où deux pièces seraient saillantes, cette description serait beaucoup moins convaincante, tout simplement parce qu'on devine que oui, quand on n'y voit rien et que ça souffle fort, forcément toucher sera plus difficile.
Alors ma question était vraiment, pourquoi dans ton texte ça fonctionne? Peut-être le contexte maritime est-il plus exotique, mais je crois vraiment que c'est le vocabulaire technique qui donne toute l'autorité, là où dans un autre texte on aurait une simple intervention du narrateur, un peu agaçante à nous dire ce qu'on peut deviner.
C'est une réflexion que je me suis faite.
Un tout petit peu moins de réflexion et un tout petit peu plus de ressenti, assez souvent dans le texte je n'ai plus vraiment tenu compte de la tempête. Notamment au cours de canonnade et de l'abordage, surtout l'abordage, on oublie tout simplement qu'il tombe des trombes et que le pont se fait laver. Il y a là peut-être une difficulté à actualiser le contexte, tout simplement parce que la situation se concentre sur d'autres éléments où la tempête n'a plus d'importance.
Et à dire vrai, quand on y pense, la tempête n'a pas grande importance... elle est spectaculaire, et fait une grande part de la tension, mais si on l'enlève on a de nouveau une poursuite, le tir des deux canons, la manoeuvre et l'abordage, tous les événements sont toujours possibles.
Donc je pense que, plutôt qu'une difficulté à actualiser, il y a à certains moments du récit un manque de pertinence à cette tempête. Ce serait assez épuisant de répéter qu'elle est là ou d'en montrer les effets si elle ne sert à rien sur l'instant, et le plus flagrant pourrait être une fois la bataille terminée, comme un accord tacite que l'orage finit avec - on n'en parle, sauf erreur, même plus.
Petite remarque, au passage, dans n'importe quel autre texte l'action du capitaine néerlandais aurait paru surjouée, une volonté de spectacle. Ici, si c'est spectaculaire, on a l'impression que c'est "historique", on y croit. Je ne saurais trop insister sur cette autorité du texte, qui est perdue dès qu'on revient à des choses plus familières, comme la scène du sextant.
Je me demande, à vrai dire, comment toi-même tu vois ce texte...
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- Demosthene
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Il semble donc que ça ne fonctionne pas comme escompté. Le "Jour noir" et le sens multiple, bien qu'un peu facile, est tout à fait voulu. C'est peut être un peu gros.
Tu dis que la tempête disparaît progressivement. C'est un des gros soucis que j'ai eu avec ce texte, de maintenir la présence des éléments tout au long du récit. J'ai essayé d'en parler plus, ça alourdissait, et d'en parler moins, le beau temps s'installait alors très vite. J'en suis arrivé à la conclusion que tu as eu toi même : La tempête n'est pas forcément l’élément déterminant, même si elle a son mot à dire sur l'issue de la bataille. C'est un des regrets sur ce texte, de ne pas avoir trouvé de "formule magique" pour ça.
On en arrive ensuite à la suite, et c'est là que je vais répondre à ta question sur ce que je pense du texte. Je suis très content de ce que j'ai fais jusqu'à ce que Weaving perde connaissance. Ensuite, j'ai eu tellement de mal à écrire ces deux derniers chapitres que ça se ressent, et que je n'ai pas réussi à en faire ce que je voulais. Tout me semble assez fade. Je les ai pourtant tourné dans plusieurs sens, et je n'ai pas réussi à trouver mieux. Du coup, que le dernier chapitre passe mal, j'en conviens assez bien.
Tu parles d'autorité du texte, je vois tout à fait. L'univers marin a ceci de fascinant qu'il suffit d'écrire "Vergue, Hauban ou Hunier" pour transporter immédiatement le lecteur sur un pont de bois, et ce même si un hunier ne lui évoque rien de précis. Un hunier, c'est un bateau qui vogue sur l'eau, avec des marins dessus, et probablement des canons prêts à faire feu. Chaque mot contient presque tout l'univers marin. Il faut avouer que pour les descriptions, ça aide bien. Peux-être (ok, sans aucun doute) n'obtiendrais-je pas le même effet en faisant lire ce texte à des passionnés de marine à voile. Ça serait quelque chose à tenter.
Merci pour ton retour, et content que dans l'ensemble, ça t'ai parlé.
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- San
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le jour noir, le ciel qui se confond avec la mer suivi juste après du profil au brisant agité (bah ils se confondent ou pas?) le fait qu'il soit midi (?) les nuages déferlants et humides (ou alors c'était le jour?) etc... mon problème principal c'est surtout qu'on s'emmêle...
Le craquement des éclairs et le tonnerre des vagues > pour améliorer cette figure, où tu utilises le tonnerre (associé aux éclairs) pour les vagues, il faudrait utiliser un truc de vagues pour les éclairs, comme le déferlement, ou qu'est-ce qu'elles font comme bruit les vagues... elles crèvent, elles explosent? (enfin c'est du détail)
Et pour le dernier chapitre, je l'aime bien mais je dirais qu'il aurait davantage sa place comme premier chapitre d'un autre texte (en le remaniant bien sûr). En fait, Demo, quand tu me l'as fait lire, je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il y ait ce chapitre supplémentaire, j'étais sûre que tu aurais arrêté l'histoire à l'enterrement marin. Mais sinon il est bien je trouve.
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- Demosthene
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Le dernier chapitre était au départ une fin juste pour moi, une ébauche de la trame globale du récit.
Il est devenu un épilogue, puis s'est étoffé jusqu'à devenir un chapitre. Je ne voulais pas laisser l'histoire sans révéler le contenu de ce coffre. Peut-être aurais-je du.
Ce chapitre 6 serait-il moins incohérent en introduction d'une prochaine histoire ? Personnellement, je ne crois pas, mais quel est votre avis ? Disons qu'après un tel chapitre d'introduction, il faut que l'histoire parle de ce à quoi sert cet étrange sextant. Et du coup, ça ne colle plus avec la forme générale qui est basée comme une série TV des années 90. Des histoires qui peuvent être lues indépendantes, et qui font lentement avancer une trame globale.
Chaque fin d'histoire fait donc avancer un peu le récit. J'aurais pu m'arrêter au coffre, mais ça m'aurait obligé à révéler son contenu au début de la prochaine histoire, avec pour risque de décevoir le lecteur, si le sextant n'y est pas utilisé (ce qui sera vraisemblablement le cas).
Encore que... j'entrevois un moyen de combiner tout ça, et de donner du peps à ce chapitre 6... A suivre
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- San
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- Zarathoustra
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Tout le monde a parlé de cette tempête. Le problème principal, c’est effectivement qu’elle reste totalement accessoire. On peut très facilement la retirer. Si les descriptions sont bonnes, il en résulte, tel quel, une sensation d’avoir lu un truc qui retardait l’histoire alors qu’il me semble que cela aurait dû être différent. Tu as dit que tu avais essayé de mieux l’intégrer mais que ça finissait par faire trop dans ton texte. C’est possible que ça finisse par ce résultat mais j’ai quelques idées à tester.
La première, c’est d’exploiter ton idée de fantastique. Là, ça tombe comme un cheveu dans la soupe et puis ce n’est plus reprit. Donc j’aurais déjà lancer des descriptions sans se préoccuper de l'histoire et qu’on tombe sur un bateau par hasard et au prise avec les éléments. Et j’aurais donné l’impression qu’il y avait autre chose qu’une tempête normale. Au lieu de le dire, j’aurais suggéré le surnaturelle. Et d'un coup, cette tempête n’est plus un décor mais un vrai acteur, avec des intentions. Et le bateau devient un jouet des dieux, en quelques sortes. Pour mieux intégrer la tempête à la suite, j’aurais continué à lui donner un rôle actif, comme si son but était de détruire le bateau.
Là, c’est d’autant plus flagrant qu’elle te gène, que tu es obligé de minimiser son rôle. Par exemple, quand les pirates tirent pour démâter au canon, pour moi, c’est complétement improbable, voire impossible vu le cadre que tu as posé avant (cf. la lutte entre Neptune et Jupiter).
On arrive au 2eme problème : le manque de tension. Je trouve que tu aurais dû inverser les rôles entre les ba^teaux : commencer d’abord par les pirates qui n’arrivent pas à rattraper leur adversaire puis montrer pourquoi (et du coup, tu aurais pu exploiter le fantastique). Les hollandais auraient manœuvré audelà de tout ce qui est raisonnable (et finiraient par le payer en démâtant, où en ayant des voiles déchirées etc.) -> on montre à nouveau la puissance de la tempête et on peut continuer à jouer avec le fantastique (par exemple, Neptune aide l’un, Jupiter l’autre). Là, dès le départ, tu expliques qu’ils vont se faire rattraper, donc c’est un non suspense.
Même chose, au moment du duel des deux capitaines, on peut mieux mettre en valeur le rôle de la tempête.
De même quand tu écris pour terminer le chapitre 3 « Tout ne fut plus que chaos ». Il me parait plus intéressant de nous le faire sentir que de le dire littéralement. En plus, c’est assez excitant à essayer à faire naître une telle impression (par contre certainement très difficile).
Quant au chapitre 4, je trouve la scène du combat mal construite. Il y a pourtant une surprise sur le dénouement mais ce n’est pas mis en valeur
2eme point à travailler : les dialogues.
C’est normalement un moyen de dynamiser, de créer des tensions. Les tiens font le contraire. Ils décrivent.
Exemple : tu fais dire à l’hollandais, pour lancer ton combat :
Je ne saurais vous laisser fouler mon pont plus longtemps, lui dit-il en le menaçant de son sabre.
Heu, est-ce que tu crois que ça augmente la tension ou que cela la neutralise ? Déjà, pour cette scène, oublie le « dit-il ». Et ce qui aurait été éventuellement dynamique, c’est une joute verbale. Là, le pirate ne dit rien.
Même chose pour ta fin. Tu dis que tu la trouves terne. C’est vrai. Mais c’est la faute de tes dialogues. Pour que ce soit intéressant, il faut que tes deux personnages se disent des choses que tu ne peux pas dire autrement. Là, tu racontes ton histoire. A la limite, pour les dialogues, tu aurais dû les exploiter pour qu’on sente leur personnalité. Tu introduis en plus quelqu’un qu’on ne connait pas. C’est le moment idéal pour te lâcher en oubliant ton histoire pour t’intéresser à tes personnages. Tu dois nous intriguer avec ce personnage qui débarque à la fin. Et tu peux le faire dire n’importe quoi, du moment qu’on sente leur vécu, leur personnalité, leur passé commun, ce qui les lie, ce qui les opposes. Mais surtout pas raconter ton scénario. Ton dialogue doit le mettre en valeur, pas le remplacer.
Exemple
Moi, j'aurais inverser comme ça:- Oui, mais sans les tables astronomiques, ça te fait juste un beau presse papier... désolé.
Weaving sourit en sortant de sa poche un petit livre à couverture de cuir. Il portait sur la tranche la même griffe étrange faite d’une voile sur trois rocs. Le Capitaine le feuilleta négligemment. Sur toutes ses pages s'étalaient des colonnes continues de chiffres incompréhensibles.
- Tu veux parler de ça ? lui dit Weaving dans un demi-sourire.
Enfin, j'ai brodé pour que ça soit plus concret. Tu vois ce que je veux dire?- Oui, mais sans les tables astronomiques, ça te fait juste un beau presse papier... désolé.
- Tu veux parler de ça ? lui dit Weaving dans un demi-sourire
Weaving sortit de sa poche un petit livre à couverture de cuir. Le Capitaine s'en empara avec curiosité. Il portait sur la tranche la même griffe étrange faite d’une voile sur trois rocs. Sur toutes ses pages s'étalaient des colonnes continues de chiffres incompréhensibles. Mais lui savait ce qu'ils cachaient. Des zéros... Pleins de zéro avec un chiffre devant... Tout en or...
.
Un dialogue, il faut un enjeu. Et là, tu les as : une découverte du trésor et une négociation. Mais il faut mieux mettre en valeur ça. Par exemple, Weaving peut sortir l’objet et l’autre peut ne pas comprendre ce que c’est. Il ne voit qu’un sextant (c’est ce que tu as fait). Mais tu n’as pas posé l’enjeu avant. Donc avant, tu peux dire qu’il a trouvé une fortune et qu’elle se cache juste dans un petit sac ou dans une petite boite. L’autre l’ouvre, la referme et lui rend sans comprendre. Weaving lui demande de regarder plus prêt et il voit que le sextant n’est pas normal. Mais il ne comprend pas, il est juste intrigué. Et enfin, il sort le livre, et là, on voit les yeux de l’autre briller, car il a compris.
Et puis, ta négo, il faut créer un rapport de force, là, on sait que c’est Weaving qui mène le bal et tu escamotes tout ce qui aurais pu nous exciter : nous faire comprendre un danger, une difficulté. Là on sait qu’il y a beaucoup d’argent. Et ça, on s’en doute depuis le départ.
Dernier point : Weaving.
Je trouve ton héros un peu trop prévisible, il fait trop parfait capitaine, on frise régulièrement les clichés. Et là aussi, lorsqu’il parle, c’est souvent pour donner un ordre, donc c’est pas intéressant. Tu le rends fonctionnel alors qu’on doit le sentir vivre. Lorsqu’il parle, imagine des dialogues qui ne servent à rien mais qui le caractériseraient davantage. En fait, on ne sait pas ce qu’il pense, ce qu’il ressent sorti de son rôle de capitaine, or il est plus que ça : c’est un humain et c’est ton héros.
Donc, la scène de combat avec le hollandais aurait dû nous le rendre plus vivant, plus concret, justement en le faisant parler.
Voilà ce que je vois en piste de réflexion.
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- Demosthene
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Merci beaucoup pour ton analyse détaillée. Je ne vais pas tout reprendre point par point, mais je trouve beaucoup de choses dans tes commentaires, et beaucoup de pistes d'amélioration, et principalement sur le scénario et la construction des dialogues.
Comme je le disais plus haut, je vais probablement retirer ce chapitre 6 de la version finale, et en faire une histoire complète, j'ai un scénario pour ça. Mais nul doute que le dialogue restera et qu'il faudra que je le retravaille tant il est plat dans sa version originale.
Merci beaucoup en tout cas pour le temps que tu as pris.
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